31 Janvier 2005

Titan : les premières hypothèses

14 janvier 2005. Après 3 semaines de silence, Huygens sort de sa torpeur. 4 h avant son arrivée sur Titan, la sonde est réveillée par son horloge interne.
31 janvier 2005
Crédits : ESA/NASA/JPL/University of Arizona
Crédits : ESA/NASA/JPL/University of Arizona

Une descente dans l’atmosphère froide du satellite rythmée par l’ouverture successive de 3 parachutes et le ballet constitué par tous les instruments de la sonde en action. Du 1er signal à la 1 ère hypothèse, de la tension extrême à l’explosion de joie, un aperçu des 1ères heures « après Huygens »…

Estimation du site d’atterrissage de Huygens. La descente a duré 2 h 32 min. 72 min après l’atterrissage, Cassini est passé sous l’horizon de Titan et a perdu le signal. On suppose que Huygens a fonctionné plus de 5 h mais il faut encore attendre l’analyse des données des radiotélescopes européens pour le confirmer.

De longues minutes d’angoisse

Pour la presse comme pour les scientifiques, la mission Huygens est unanimement un succès… qui a rapidement effacé les quelques longues minutes de tension extrême auxquelles les équipes du Centre de Contrôle de Darmstadt ont du faire face.
En effet, ce 14 janvier, les 1ères données qui arrivent à l’ESOC* indiquent « receiver OFF ». Pendant 7 longues minutes, seuls ces 2 mots défilent sur les écrans de contrôle. Explication qu’on obtiendra plus tard : la télécommande de mise en route des canaux de réception à bord de Cassini n’aurait été envoyée que partiellement, provoquant un disfonctionnement dans l’acquisition des données.

Des 2 canaux, seul le canal B a reçu les données de Huygens, résultats par ailleurs excellents et n’affichant presque aucune perte. En définitive, il semble que le disfonctionnement du canal A n’affecte que le nombre d’images recueillies (350 au lieu de 700) et certains senseurs. La qualité des mesures des radiotélescopes, au-delà de toute espérance, pourrait compenser cette perte.

Le saviez-vous ?
Un contact en avant-première…
20 W seulement, soit moins d’une ampoule d’appartement : c’est la puissance du signal émis par Huygens en direction de Cassini. Près de 18 radiotélescopes terrestres ont pointé leur antenne dans la direction de Saturne avec un mince espoir de capter ce faible signal. L’intervention des radiotélescopes n’avait été envisagée qu’un an auparavant, lorsqu’on s’aperçut qu’une détection était théoriquement possible. Ces mesures pouvaient donner des indications, 3 h avant que Cassini ne retransmette les données sur Terre, sur le déroulement de la mission Huygens. Un « plus » pour les scientifiques, tout en sachant que si l’absence de détection aurait assurément fait monter la tension d’un cran au sein des équipes, elle n’aurait pas permis de conclure à un échec.

Les analyses préliminaires

Première analyse de la surface de Titan : un relief riche, des chenaux, preuve que quelque chose coule à la surface. Les régions claires, plus hautes, seraient constituées de glace d’eau, alors que les régions plus sombres correspondraient aux zones d’accumulation des matériaux déversés comme les poussières d’hydrocarbures.

Autre hypothèse qui reste à conforter : l’existence d’une pluie de méthane. L’expérience HASI ** a mesuré au sol une température de – 180°C et une pression de 1,5 bar, confirmant les modèles thermodynamiques existants et allant dans ce sens. L’expérience GCMS ** a enregistré un dégazage soudain de méthane, provoqué par le réchauffement du sol par la sonde. Le sol de Titan semble donc gorgé de méthane liquide sous la surface.

D’autres résultats d’expériences à bord de Huygens sont en cours d’analyse et n’ont pas encore révélé leur secret. Les premières hypothèses émises, dont l’existence d’une pluie de méthane, sont encore bien jeunes et incitent à la prudence. Malgré tout, les scientifiques ébauchent, à l’instar du cycle de l’eau sur Terre, un cycle du méthane sur Titan.

* ESOC : European Space Operations Centre
** HASI : Huygens Atmospheric Structure Instrument
GCMS : Gas Chromatograph & Mass Spectrometer

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